27 mai 2012

Château de Montreuil-Bellay, Pentecôte 2012

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                               Montreuil-Bellay, ville close de l'Anjou
                                            (Archives Michel Mercier)

                       Les îles du Thouet au pied de l'ensemble castral
                                          (Archives Michel Mercier)

Du Thouet au Thouet via le château, panoramique de 250 °...  
        (Photos Jacques Sigot)           
               



 


                                           Le Château Neuf vu de l'ouest
                          avec deux de ses grosses tours du XIIIe siècle.




25 mai 2012

Les collégiens de Beaufort sur le site du camp

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Depuis plusieurs années déjà, des professeurs des classes de 3ème du collège Molière de Beaufort-en-Vallée ajoutent à leur programme l'histoire du camp de concentration de Montreuil-Bellay pendant la Seconde Guerre mondiale.
Ils accueillent en premier dans leur établissement, pour une conférence, Sandrine Renaire, présidente de L'AMCT (Les Amis du Camp Tsigane de Montreuil-Bellay) et petite-fille d'anciens internés.
Puis ils organisent des sorties sur le site, comme ce vendredi 25 mai.

Jean-Richard et Jacques Sigot, les deux vice-présidents de l'AMCT, les accueillent. 
C'est tout d'abord, devant la maquette du camp, le rappel historique des principaux internements, de Républicains espagnols qui, hiver et printemps 1940, ont été obligés de participer, surveillés par des militaires, à la construction de l'usine de guerre, pour ne pas être refoulés dans l'Espagne franquiste. Ce devait être une poudrerie, mais elle n'était pas terminée quand les Allemands entrèrent sur le territoire de la commune de Montreuil-Bellay le 21 juin... Les derniers internés furent, de janvier à novembre 1945, des civils allemands raflés dans l'Alsace et la Moselle reconquises, et déportés à Montreuil-Bellay comme otages. 
Mais ce furent surtout des nomades (Mânouches, Gitans, Roms, Yénishs) qui, de novembre 1941 à janvier 1945, restèrent le plus longtemps derrière les barbelés électrifiés de la route de Loudun.

Les deux animateurs expliquent les ruines des anciens bâtiments, avec surtout la visite de la prison souterraine, le seul vestige intact de l'ancien camp. Elle a même conservé sa porte d'origine et des barreaux de fer à l'un de ses deux soupiraux.

Trois camionnettes de Mânouches, de passage sur la route qui longe le site, klaxonnent les collégiens. Hommage à la reconnaissance, par de jeunes Français, d'une histoire longtemps occultée.

                                              Les collégiens et leur guide sur le toit de la cave/prison.
                                                                        (Cliquer sur la photo pour l'agrandir)

Le site du collège Molière de Beaufort-en-Vallée
http://www.collegemoliere.lautre.net/

14 mai 2012

Montreuil-Bellay en 1938 et en 1926


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Montreuil-Bellay dans des publications anciennes...

- Dans un guide officiel édité en 1938 par leSyndicat d'Initiative de l'Anjou.


- Dans une coupure de journal avec un précieux article d’André Hallays décrivant ma petite ville, et principalement son ensemble castral. J’ignore le titre du journal et quand a été publié cet article. Pourtant, au verso de celui-ci, une publicité me permet de supposer son origine – presse parisienne – et une date approximative de sa parution : été 1926. En effet, j’y découvre les lignes suivantes : Train spécial à prix réduit pour Fontainebleau, Thomery et Moret. Pour favoriser les excursions dans la région de Fontainebleau, la compagnie des chemins de fer Paris-Lyon-Méditerranée met en marche, tous les dimanches, jusqu’au 19 septembre 1926, un train spécial à prix réduit
Voici cet article en son entier avec le dessin qui l'accompagne.


Notre France

Montreuil-Bellay

De mon excursion à Montreuil-Bellay, j’ai rapporté le souvenir d’un beau château, d’un site charmant, de vieilles peintures très précieuses et de quelques historiettes propres à intéresser les balzaciens. D’ailleurs, c’est le charme de toutes les promenades en France que ce pêle-mêle d’impressions variées, ce divertissement alterné des yeux et de l’imagination : l’histoire, évoquée par l’élégante tourelle qui surgit au faite du coteau chargé de verdure et de fleurs, le paysage entrevu dans le cadre que lui dessine la croisée d’un vieux logis, le murmure du passé mêlé au chantonnement des rivières sinueuses et au frémissement des peupliers, les longues routes égayées de belles ruines, de vallées ombreuses et d’anecdotes imprévues.

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Une ceinture de vieux remparts enveloppe Montreuil-Bellay. Des grosses tours à bossages encadrent la porte du bourg, qui apparaît blanc, propre et fleuri derrière ses lourdes murailles. Quelques jolies maisons de la Renaissance se détachent parmi les constructions modernes. Les jardinets débordent de roses. Des lauriers touffus décorent la cour de petites auberges. Sur le coteau escarpé, au pied duquel coule le Thouet, se dresse le château ; ses murs et ses tours font partie des défenses de la ville.
Du vieux château féodal, il reste peu de chose. La barbacane à double porte, les tours massives de l’entrée, le sombre logis des hommes d’armes, voilà les seuls débris de la citadelle du moyen âge. Le château neuf date de la seconde moitié du XVe siècle. Ces tours élégantes, ce joli promenoir qui suit les terrasses, ces petites tourelles effilées, c’est l’aube de la renaissance. La recherche de la beauté, la passion de la vie ont transformé la vieille forteresse.
Elle a la grâce un peu maniérée de cette époque indécise et charmante, la vieille collégiale du château, devenue maintenant la paroisse du bourg. Décors de feuillages et de choux frisés, niches ajourées, nervures prismatiques, fenêtres trilobées, on y trouve toute l’ornementation du flamboyant, un peu simplifiée par le vandalisme des hommes et les injures du temps. La nef est superbe, d’un jet vif et puissant.

Revenons à la cour du château. Voici les vieilles cuisines dont le seul aspect évoque l’idée de formidables ripailles. Elles ont trois cheminées : deux qui se font face, accolées aux murailles, et une troisième au centre de la salle. Le foyer de cette dernière est placé sous une haute pyramide de briques ; on y ferait rôtir des brochettes de moutons.
A côté des cuisines, appuyé au mur d’enceinte, s’élève un châtelet en forme d’équerre, avec quatre petites tours rondes à demi engagées dans la construction. Les fenêtres ont leur double meneau. Les lignes des toitures sont d’une délicate simplicité. Rien ne saurait rendre l’élégance de ce petit logis qui servit, dit-on, d’habitation aux chanoines de la collégiale.
L’édifice principal est le fragment d’un château inachevé. De la muraille qui, provisoirement, fermait la construction vers l’est, on a fait une sorte de façade et, sur ce pignon, l’on a ouvert des fenêtres surmontées d'arcatures fleuries. Regrettons un peu ces fenêtres importunes, mais sans trop y insister : les vieux châteaux sont mieux conservés lorsqu’ils continuent d’être habités, mais encore faut-il qu’ils soient habitables pour les hommes d’aujourd’hui ; d’ailleurs, Montreuil-Bellay semble entretenu avec goût et intelligence…
Dans la chapelle domestique du château, nous avons la vision la plus parfaite et la plus claire de cet âge charmant de l’art français que fut la fin du XVe siècle…
« A gauche de la chapelle est un petit bosquet avec un jardin fruitier. Ce terrain est en forme de pointe de chemise et peut contenir un demi-arpent. Ce jardin a une galerie qui règne sur la rivière avec des tours en cul-de-lampe et crénelées qui font un assez bel effet au-dehors par leur propreté et leur élévation. Cette galerie a aussi été découverte il y a environ quarante ans. »
Cette description date du XVIIIe siècle (*). Rien n’a été depuis modifié en cet endroit.

On accède à ce promenoir par une jolie tour d’escalier aux fines balustrades. Par l’embrasure de chacun des créneaux de la galerie, le regard plonge dans la vallée du Thouet. Jusqu’à la rivière, un flot de ronces et de verdures ruisselle sur des décombres de terrasses et des ruines de murailles. Le Thouet se divise par des îlots plantés de saules et de peupliers, et ses eaux paresseuses dorment sous les nénuphars d’or. Ça et là émergent les débris d’un pont très ancien. Au milieu d’un jardin aux frondaisons désordonnées, se cachent les pans de mur et l’abside à demi écroulée de l’église romane d’un prieuré de bénédictins. Sur l’autre rive, le coteau s’élève par une inclinaison plus molle vers les champs et la forêt.

(*) Description rédigée vers 1760 par les ordres du duc de la Trémoille lorsqu'il fit l'acquisition de la baronnie de Montreuil-Bellay.


- En dehors de la lithographie et de la photographie ancienne, clichés de Jacques Sigot.


Photo ancienne correspondant au dessin (DR)

Le même site, hiver 2005...

et le 25 mai 2012.

Montreuil-Bellay 1926 
en images d'aujourd'hui...

L'ensemble castral au XIXème siècle
Lithographie de Thomas Drake (1818-1895) 

Photographié le 25 mai 2012.

En maintenant sur les pas d'André Hallays...

Une ceinture de vieux remparts enveloppe Montreuil-Bellay.

Des grosses tours à bossages encadrent la porte du bourg.
Voir : Dossier sur les bossages


Quelques jolies maisons de la Renaissance...


Sur le coteau escarpé... se dresse le château ;
ses murs et ses tours font partie des défenses de la ville.
Voir : Le château de Montreuil-Bellay

 La barbacane à double porte...

Les tours massives de l'entrée...

Le château neuf date de la seconde moitié du XVe siècle.

... la vieille collégiale du château, 
devenue maintenant la paroisse du bourg.

La nef est superbe, d'un jet vif et puissant.

Ce joli promenoir, qui suit les terrasses... 

On accède à ce promenoir 
par une jolie tour d'escalier aux fines balustrades.

Voici les vieilles cuisines... 
Le foyer... est placé sous une haute pyramide de briques... 

... un châtelet en forme d'équerre, 
avec quatre petite tours rondes 
à demi engagées dans la construction. 

Le Thouet se divise parmi des îlots plantés de saules et de peupliers.
Voir : Le Thouet à Montreuil-Bellay

Çà et là émergent les débris d'un pont très ancien.


... et l'abside à demi écroulée de l'église romane 
d'un prieuré de bénédictins. 
Sur l’autre rive, le coteau s’élève par une inclinaison 
plus molle vers les champs et la forêt.

Merci de votre visite...

Dans l'abside de l'ancienne église paroissiale
ce chapiteau des 2 langues, tout un programme...
la sagesse médiévale :
Ce que l'on pense et ce que l'on dit...
Alors, méfions-nous de ce l'on nous dit...
Vous voilà prévenus !

9 mai 2012

Valérie Trierweiler et Montreuil-Bellay

Le 25 avril 2012, le quotidien Ouest-France publiait plusieurs articles sur Valérie Trierweiler. Dans l'un d'eux, elle évoquait la petite ville angevine de Montreuil-Bellay, à une quinzaine de kilomètres au sud de Saumur, baignée par la rivière du Thouet, affluent de la Loire.

Je souhaite reposer à Montreuil-Bellay
C'est de là que vient ma famille maternelle. J'y ai beaucoup de souvenirs, de bons souvenirs. Nous y allions en vacances quand nous étions enfants. Plus tard, j'y ai acheté une petite maison où j'ai passé des étés heureux. Mais je ne l'ai plus. Je n'y ai plus de famille non plus. C'est pourtant un lieu auquel je suis très attachée. J'y ai été baptisée, je m'y suis mariée. Et c'est là où je souhaite être enterrée.

La petite maison de Valérie Trierweiler 
vue du pont Napoléon sur la rivière du Thouet.


Le port Sainte-Catherine au bas du jardin.


Mariage tsigane à Montreuil-Bellay en 1885


Mariage romantique des Zingares (Zingari) Koushites

en 1885 à Montreuil-Bellay

 

Pré au pied de la vieille ville

Extrait du blog de Denis Toulmé : Fils du Vent
Ouvrir ce lien pour retrouver la source.

Le mariage Zingare koushite selon Alphonse-Louis LALLY 
Voici, selon l'ordre chronologique, comment s'est déroulé le mariage dans le roman d'Alphonse-Louis LALLY, Hakkini Bougouri, 1930.



Danse de Tsiganes dans le pré
Photographie tirée du livre Sur les traces des derniers nomades, Hachette, 1962
 
Au cours d'une partie de pêche organisée, le père de la prétendante mis au fait des volontés conjointes  de son fils adoptif, un gadjé récupéré sur la route, et de sa fille de s'unir, rappelle à son futur gendre les valeurs morales inhérentes à un bon mariage et interroge le jeune homme sur son aptitude à construire un foyer heureux.
Cette formalité réalisée, le père autorise le soir même le Baiser des fiançailles devant le clan assemblé. "Ce baiser vous liera pour jamais et l'infidelité à la foi jurée chez nous est toujours sévèrement punie." Page 82
Les fiançailles durent 12  mois. Période durant laquelle Hakini, le prétendant doit aider la jeune femme Maïne, au surnom de la Zoraiya (étoile du matin), à se garder sans reproche et sans tache.
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Les 12 mois se sont écoulés lorsque le douze juillet 1885, le mariage se prépare à Montreuil-Bellay (49).
Les roulottes sont arrivées la veille et se sont installées dans un pré que les Zingares Koushites connaissent. De bon matin, le brigadier de gendarmerie Mignot est dépêché pour contrôler que l'installation est en règle. Et en effet, les Bohémiens avaient acquitté le prix de leur location de 50 francs au propriétaire du pré. Le brigadier apprend en outre que les 40 roulottes sont réunies pour les célébrations d'un mariage.
Tout le monde s'active pour nettoyer le harnachement des "chevaux enrubannés ou fleuris". Le nettoyage des roulottes, disposées en arc de cercle non tendu parallèlement à une haie vive, est du ressort des femmes.
Une délégation qui comprend le futur mari, se rend en ville (Saumur) pour acheter "la pâtisserie et les liqueurs".
Les cadeaux pour  les mariés :
- la roulotte des mariés, cadeau du chef et père de la mariée.
- le mobilier, offert par la "mama",
- un cheval offert par le fils aïné du chef, le beau-frère Képens,
- le trousseau ainsi que les bijoux offerts par la tante de Maïne,
- la toilette nuptiale et les couverts en argent apporté par les cousines dont Mina,
- Fleurs et parfums "indispensables à tout mariage Zingare" du fait de la cousine Michaëla,
- 500 pistoles en or des proches parents.

De jeunes filles décorent la roulotte nuptiale "présumé tombeau de la vertu de la Zoraïya". "La main des vierges ayant seule qualité pour placer les plantes décoratives et les fleurs". Page 126
Les plantes décoratives : lierres, buis, houx, oeillets blancs, roses trémières.
La mariée a pris un bain prolongé dans la rivière. Les coiffeuses "débroussaillent la masse capillaire qui sèche sur ses épaules et jusques à terre."
Le soir vient, puis la nuit. Le son du cor retentit soudain. C'est la vieille Hogar, la doyenne du groupe, qui, juchée sur le toit de sa roulotte, invite chacun à se rapprocher des tables.
Les serveuses distribuent fourchettes, plats de fer battu, gobelets d'étaim, chauteaux de pain.
L'épouse apporte à l'époux les éléments du premier service à eux destinés. La coutumes permet à la femme de manger avec son mari les soirs d'épousailles zingares.
"Les célibataires, les veufs, les isolés sont servis par celle qui n'ont pas ou plus charge d'époux."
Le repas a alors lieu. 

 A la fin, "une minute de profond recueillement" réunit les participants, et, sur un signal donné par le chef, l'hymne istarien est entonné.
- A l'épouse, il est rappelé à la mariée que celle-ci doit obéissance, fidélité, dévouement à son époux.
- Au mari, chef de la nouvelle famille, "il est recommandé d'aimer, de protéger, de guider dans le dur sentier de vie" la nouvelle mariée.
Une fois l'hymne terminé, les assistants se lèvent et un long cri de "longue et heureuse vie aux enfants de Marius "(chef du clan), retentit par 3 fois.
Le soleil se lève. La musique est proposée aux convives. Les instruments se composent comme suit : violons, violoncelles, cithares, flûtes, une harpe, un basson.
Les mariés ouvrent la danse en compagnie des témoins.

A minuit, c'est le Coucher de la mariée, "dernière et significative phase des noces zingares".
Les proches des époux se dirigent vers la roulotte nuptiale dont ils gagnent le balcon, afin de préparer "l'Appel de l'épouse à l'époux".
Avant de monter l'escalier vers sa future demeure, la mariée demande à son père "la permission de monter". Le père refuse puisque cette roulotte a été construite pour accueillir un couple et non une personne seule. La mariée supplie alors et s'en remet à Ishtar : c'est pour se préparer et appeler son époux. Le père obtempère alors, s'en remettant également à la déesse.
Parvenue en haut de l'escalier, on aide la Zoraïya à venir à bout du symbolique ruban bleu jusqu'à ce qu'il cède et qu'elle puisse pénétrer à l'intérieur de la roulotte.
Maïne, "suivie de sa mère" entre enfin chez elle. Les autres rejoignent les parents proches et attendent "l'apparition de l'épouse au balcon de sa demeure fleurie".
La mère, à son tour, abandonne la jeune mariée.
La mariée apparaît vêtue d'un "léger vêtement d'amour", mousseline ou tulle transparente qui voile à peine les beautés de la vierge.
"Avançant sur ses babouches, logeant ses pieds nus et parfumés, la belle Zoraïya lentement détache l'autre ruban bleu qui lui ceint la taille et qui crie sa vertu". Elle le roule sur son doigt, puis le laisse tomber à ses pieds.
La jeune Koushite dit à tous qu'elle attendait l'amour.
Le marié souhaite ensuite la bonne nuit à tout le monde...

Une curiosité montreuillaise : une locomobile


La belle locomobile de Fernand Reclu

Après avoir passé le pont, vous escaladez la rampe pour aller vers Doué-la-Fontaine ou Angers ; sur votre droite, au numéro 154, une curieuse scène au-dessus de la porte.

En 1901, l’immeuble appartient à Fernand Reclu qui demande à un certain Lecocq de lui sculpter cette étrange machine
Intrigué, j’allai interroger son fils Albert, en février 1987. Ce pourrait être à première vue un tracteur tirant une charrue, mais c’est plutôt une locomobile utilisée pour arracher les ceps de vigne que l’on veut supprimer. Plus exactement une défonceuse, les roues arrière de la locomobile n’étant pas motrices, comme ici.
Nous sommes à la fin du XIXème siècle, et plus de la moitié du vignoble français a été dévasté par le phylloxéra, minuscule puceron que les Américains nous en envoyé vers 1860, comme ils nous avaient déjà offert l’oïdium dix ans auparavant. En 1884, quelque 67 départements sont atteints : 1.300.000 hectares de vignes détruits. Un déficit annuel évalué à 400 millions de francs-or. Quand on s’aperçoit que, greffé sur des plants américains immunisés, le cépage indigène résiste, on commence à reconstituer tout le vignoble national.
Pour reconstituer le sien, Georges Millin de Grandmaison (1893-1940) crée en 1894 deux champs d’expérience, l’un sur le calcaire dur de la Champagne de Montreuil-Bellay, l’autre sur les conglomérats d’argile rouge dans la forêt de Brossay. En 1905, il reçoit une médaille pour ses vins rouges à l’Exposition de Liège.

La photo qui a servi de modèle au sculpteur.

C’est alors que Fernand Reclu achète son énorme machine en Angleterre. Il me la décrit : Elle se compose de trois parties : la machine à vapeur propre-ment dite, avec sous le ventre une poulie autour de laquelle s’enroule un gros filin d’acier, est stationnée en travers à l’extrémité du champ ; un fourgon, avec une autre poulie, reste à l’autre extrémité du champ ; entre les deux, tirée par un câble, une puissante charrue creuse le sol jusqu’à 80 centimètres de profondeur ; la charrue, rappelée par le câble, retourne au fourgon sans travailler ; puis l’on recommence. Sur la route, le fourgon sert à transporter les briquettes de charbon et l’huile.
A Montreuil, il y a les trois frères Reclu, et à Brossay, les cinq frères Falloux. Cela avait du bon et du mauvais, m’explique Roger Falloux, le fils de Jules. Creuser aussi profond arrachait toutes le vieilles racines, mais en même temps, tous les cailloux et l’argile remontait à la surface. Aujourd’hui, on va beaucoup moins creux. Les Falloux défonçaient le terrain et replantaient, travaillant au forfait avec garantie de reprise. Pour se payer, ils se réservaient parfois les six premières années de récolte. En réalité trois, parce que la vigne ne produit que la quatrième année.
La défonceuse de Fernand Reclu est toujours là, figée dans le tuffeau, plus d’un siècle après…