20 oct. 2015

Faut-il croire ce que disent nos dictionnaires ?

Assurément et, pendant toute ma carrière d'instituteur, j'en gardai un sur mon bureau, ou sur une étagère dans la classe, et je demandais à mes élèves de le consulter dès le moindre doute. 
En 1990, lorsque je pris ma retraite, ils m'ont offert un gros Dictionnaire Encyclopédique Larousse ; "en couleurs", affiche la page de garde ; aujourd'hui en piteux état à force d'avoir été ouvert.

Vous avez dit "Larousse"...
 Un portrait de Pierre Larousse ;  extrait du Net.

Pierre Larousse, une référence dans l'Hexagone ! Et pourtant...
Lorsque je vivais et enseignais à Meknès, au Maroc, à la fin des années 1970, j'ai acheté un très ancien dictionnaire Larousse - au format 85/135 mm - dans une échoppe/bazar de la médina. Une pièce de collection que j'ai fait relier pour qu'il ne s'abimât pas. Trois parties le composent : les noms communs, les noms propres et, entre ceux-ci et ceux-là, 82 pages de notes [étymologiques, scientifiques, historiques et littéraires].

Voici un extrait de ce qu'écrit l'auteur dans son "Avis à mes lecteurs" qui ouvre le volume.
Ce petit dictionnaire est devenu classique en quelques années et, depuis 1855, époque de sa première apparition, un nombre très considérable d'exemplaires s'est écoulé. [...].
A tout ce que contenaient les vingt-neuf premières éditions, des parties complètement neuves  ont été ajoutées. Ces parties consistent en développements relatifs à toutes les circonstances, littéraires, historiques ou mythologiques, qui ont donné naissance à cette foule d'allusions que l'on rencontre à chaque pas dans la lecture et la conversation, et qui demeurent une énigme indéchiffrable pour celui qui n'a pas la clef du fait même où ces allusions puisent leur source.
La partie géographique a été revue avec soin et mise au courant des changements les plus récents.

                                                                                       Pierre Larousse

Et pourtant...
Voici comment, dans la partie des notes, Pierre Larousse définit le mot "NEGRE" :

Nègre. Nom donné spécialement aux habitants de certaines contrées de l'Afrique, de la Guinée, de la Sénégambie, de la Cafrerie, etc., qui forment une race d'hommes noirs, inférieure en intelligence à la race blanche, dite race caucasienne. La coloration de la peau paraît être due, chez les nègres, à l'influence du climat. C'est une modification acquise qui devient transmissible et héréditaire ; mais il est généralement reconnu aujourd'hui qu'une famille nègre, transplantée dans nos climats, arriverait à la couleur blanche après quelques générations, et sans mélange de races.

Incroyable mais vrai... que c'est écrit ainsi...
Avec le désir de rendre les dits nègres aussi "intelligents" que ses propres ressortissants, l'Europe blanche pouvait consciencieusement "civiliser" ces hommes de couleur qu'elle faisait dès lors marcher au pas.
Etait-ce au départ la seule raison ?

Voici la nouvelle définition du mot "nègre" dans l'exemplaire offert en 1995 par mes élèves à leur maître en partance. Edition de 1979 :
Nègre, négresse : Personne appartenant à la race noire, mot péjoratif, remplacé par Noir.
L'Académie était passée par là... mais je croyais que les races n'existaient pas ?...

Il serait préférable que le vieil instit se tût, ses certitudes et ses doutes nous embrouillent trop..


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Pierre Larousse a sa statue au centre du joli bourg de Toucy [en Bourgogne, département de l'Yonne] où il est né en 1817 ; d'un père forgeron et d'une mère cabaretière.
Les jours de marché, les étals la ravissent au regard des chalands.

 La statue ; extraite du Net.

Anecdote reçue de l'ami Frédéric :
Pourquoi Larousse regarde-t-il dans une direction particulière ?
Il regarde en direction des toilettes publiques. Non pas parce qu'il aurait eu quelque affinité avec les vespasiennes, mais parce qu'à l'emplacement de ces dernières, se tenait l'école adossée au rempart de la vieille ville, école dans laquelle il a un temps enseigné comme instituteur.



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