5 nov. 2014

Montreuil-Bellay… Montauban et les Républicains espagnols


Cliquer sur les documents pour les agrandir.

A Bernadette et José [Joseph] Gonzalez, mes hôtes attentionnés à Montauban, jolie ville de brique que je découvrais pour la première fois.


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1939 voit la fin de la Guerre d'Espagne. En septembre la France mobilise pour la Seconde Guerre mondiale et il faut construire rapidement des usines de guerre.
Le projet de la G.T.M. (Société des Grands Travaux de Marseille) est alors de bâtir une poudrerie sur les terres de la commune de Montreuil-Bellay (Maine-et-Loire), loin du front traditionnel que sont l’Alsace et la Moselle. La G.T.M. est maîtresse d’œuvre et commande une dizaine de sous-entreprises différentes.

Le 24 janvier 1940, arrivent en gare de Montreuil-Bellay 250 Républicains espagnols, 8ème section de la 184ème CTE (Compagnie de Travailleurs Etrangers), à qui l’on demande de participer au chantier.  Ces hommes ont fui l’Espagne franquiste quelques semaines auparavant.

Témoignages que j’ai recueillis auprès de deux d’entre eux :

- Lesmes Garcia.
Dès mon arrivée sur le territoire français, on m’a interné dans le camp d’Argelès-sur-Mer. C’était fin 1938, avant la plupart de mes compatriotes, parce qu’étant dans l’aviation, j’avais pu fuir l’Espagne plus facilement. Février 1939, on m’a transféré à Gurs où les Basques et les aviateurs étaient alors regroupés avec les Brigades internationales.
Un jour, on a demandé des volontaires pour travailler, ceux qui n’étaient pas intéressés devant rester dans le camp. Un commando fut formé et nous avons été embarqués dans un train. Nous sommes enfin arrivés à Montreuil-Bellay après quelques haltes plus ou moins longues. […]
Un matin de juin [1940] […] le capitaine nous a dit : « Il n’y a plus d’espoir, chacun pour soi, Dieu pour tout le monde. » Les Allemands étaient annoncés dans la région. On nous a distribué des bons de ravitaillement pour Parthenay et nous avons tous fui le chantier.


- Manuel G. Sesma.
Je suis arrivé en France le 19 février 1939 et interné le même jour après une longue marche à pied au camp de Saint-Cyprien. C’était une vaste étendue de la côte méditerranéenne encerclée de fils de fer barbelé et gardée par des soldats sénégalais armés de fusils et de mitrailleuses. A ce moment-là, il n’y avait aucun baraquement. Tout et tous au grand air.
De Saint-Cyprien,  j’ai été transféré au camp de Gurs le 8 juillet 1939. Là, il y avait au moins des baraquements, sur un terrain marécageux où abondaient les rats et la boue.
Et au bout de six mois, j’y ai été enrôlé, de force, dans la 8ème section de la 184ème compagnie de travailleurs espagnols comprenant 250 individus. Notre destination était le Maine-et-Loire, et nous sommes arrivés à la gare de Montreuil-Bellay le 6 janvier 1940.

 En avril 1987, je suis allé retrouver Manuel Sesma chez lui, à Fitero
pour recueillir son témoignage.

En juin 2014, Maryse-Alice Gargaud, de l'association FRAIDA AN MARO DJI, me contacte pour me demander de participer aux Rencontres de Borredon début novembre à Montauban, et me met en rapport avec José [Joseph] Gonzalez, Président du CIIMER (Centre d’Interprétation et d’Investigation de la Mémoire de l’Espagne Républicaine) dont le siège est à la gare de Borredon (commune de Montalzat – 82) où, dans la semaine du 5 au 12 mars 1939, arrivèrent plus de 16.000 soldats républicains en provenance des camps de la Méditerranée et que l'association a achetée et aménagée en lieu de mémoire.


Les animations commencent le samedi 1er novembre à Montauban dans le temple protestant, Gran Rue Sapiac. Juan Francisco Ortiz, élève d'Ida Presti et d'Alexandre Lagoya donne un récital de guitare classique avec entre autres, au programme, des oeuvres d'Albeniz et de Maurice Jarre (Mourir à Madrid) et des préludes sur des poèmes de Frederico Garcia Lorca.

Juan Francisco Ortiz dans le Temple des Carmes.

Le lendemain matin, le dimanche 2, se déroule dans la gare de Borredon, où est présenté une exposition sur les Républicains espagnols pendant la Seconde Guerre mondiale, en France, avec évocation du camp nazi de Mauthausen, en Autriche. Des panneaux rappellent le calvaire des Tsiganes dans des camps en France.

La gare de Borredon autrefois. (Tableau appartenant à José Gonzalez)

La gare aujourd'hui avec, devant, un wagon de voyageurs des années 1950.

Plaque mémorielle sur la façade de la gare.

Pendant les conférences dans la gare.


Après une chaleureuse agape dans la cour de la gare, il est temps de parcourir en voiture les six kilomètres que les Républicains ont couverts à pied en 1939 pour atteindre le camp de concentration de Septfonds.

L'exode des Républicains espagnols.
 (Statuettes exposées dans la gare de Borredon)

 Baraque 34 du camp devant l'église de Septfonds.

Plan du camp de Septfonds.

Nous gagnons tous ensuite le cimetière de Sepfonds où reposent des victimes du camp.



 Une tombe parmi les autres, celle de Luis Carraux Ruiz.

Le lendemain, lundi 3, c'est l'hommage à Manuel Azana.


Manuel Azaña
dernier président de la IIe République espagnole
en exercice avant la victoire franquiste
Entré en France le 4 février 1939, il décède le 3 novembre 1940 au siège montalbanais de la Légation du Mexique, sis à l’Hôtel du Midi, où il avait reçu asile en vue d’entraver les manœuvres des polices pétainiste et franquiste visant à son enlèvement ; le 5 novembre, son cercueil est amené au cimetière de Montauban recouvert d’un drapeau mexicain, en manière de réplique contre l’interdiction du drapeau républicain, signifiée par les autorités vichystes.



Manuel Azana, portrait officiel  Deux documents extraits du Net.

Montauban ; l'hötel du Midi est l'immeuble à gauche de la cathédrale.

L'attente de la gerbe devant le cimetière de Montauban.
De face, José Gonzalez et son épouse Bernadette.

La tombe de Manuel Azana (1880-1940).

Enfin, l'après-midi, je donne une conférence sur les Tsiganes dans un amphithéâtre de l'ancien Collège :
- Qui sont les nomades que l'on interna ?
- Le camp de concentration de Montreuil-Bellay, à l'origine une poudrerie en partie construite de janvier à juin 1940 par des Républicains espagnols embrigadés.

Pour retrouver ces deux conférences, cliquer sur les liens ci-dessous :
http://camp-montreuil-bellay.eklablog.com/ces-tsiganes-que-l-on-interna-p104741
http://jacques-sigot.blogspot.fr/2008/08/montreuil-bellay-un-camp-de.html

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 à Jean-Luc, gentil compagnon et précieux guide pour la découverte de Montauban.

Parmi d'autres, deux images de cette jolie ville...

La Place Nationale avec son exceptionnelle double rangée d'arcades.

La mort du dernier centaure 
d'Antoine Bourdelle, comme Ingres, enfant de Montauban.




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