Mariage romantique des
Zingares (Zingari) Koushites
en 1885 à Montreuil-Bellay
Pré au pied de la vieille ville
Au cours d'une partie de pêche organisée, le père
de la prétendante mis au fait des volontés conjointes de son fils
adoptif, un gadjé récupéré sur la route, et de sa fille de s'unir, rappelle à
son futur gendre les valeurs morales inhérentes à un bon mariage et interroge
le jeune homme sur son aptitude à construire un foyer heureux.
Cette formalité réalisée, le père autorise le
soir même le Baiser des fiançailles devant le clan
assemblé. "Ce baiser vous liera pour jamais et l'infidelité à la foi
jurée chez nous est toujours sévèrement punie." Page 82
Les fiançailles durent 12 mois. Période
durant laquelle Hakini, le prétendant doit aider la jeune femme Maïne, au
surnom de la Zoraiya (étoile du matin), à se garder sans reproche et
sans tache.
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Les 12 mois se sont écoulés lorsque le douze
juillet 1885, le mariage se prépare à Montreuil-Bellay (49).
Les roulottes sont arrivées la veille et se sont
installées dans un pré que les Zingares Koushites connaissent. De bon matin, le
brigadier de gendarmerie Mignot est dépêché pour contrôler que l'installation
est en règle. Et en effet, les Bohémiens avaient acquitté le prix de leur
location de 50 francs au propriétaire du pré. Le brigadier apprend en outre que
les 40 roulottes sont réunies pour les célébrations d'un mariage.
Tout le monde s'active pour nettoyer le
harnachement des "chevaux enrubannés ou fleuris". Le nettoyage des
roulottes, disposées en arc de cercle non tendu parallèlement à une haie vive, est
du ressort des femmes.
Une délégation qui comprend le futur mari, se
rend en ville (Saumur) pour acheter "la pâtisserie et les liqueurs".
Les cadeaux pour les mariés :
- la roulotte des mariés, cadeau du chef et père de la mariée.
- le mobilier, offert par la "mama",
- un cheval offert par le fils aïné du chef, le beau-frère Képens,
- le trousseau ainsi que les bijoux offerts par la tante de
Maïne,
- la toilette nuptiale et les couverts en argent apporté par
les cousines dont Mina,
- Fleurs et parfums "indispensables à tout mariage
Zingare" du fait de la cousine Michaëla,
- 500 pistoles en or des proches parents.
De jeunes filles décorent la roulotte nuptiale "présumé
tombeau de la vertu de la Zoraïya". "La main des vierges ayant seule
qualité pour placer les plantes décoratives et les fleurs". Page 126
Les plantes décoratives : lierres, buis, houx,
oeillets blancs, roses trémières.
La mariée a pris un bain prolongé dans la rivière.
Les coiffeuses "débroussaillent la masse capillaire qui sèche sur ses épaules
et jusques à terre."
Le soir vient, puis la nuit. Le son du cor
retentit soudain. C'est la vieille Hogar, la doyenne du groupe, qui, juchée
sur le toit de sa roulotte, invite chacun à se rapprocher des tables.
Les serveuses distribuent fourchettes, plats de
fer battu, gobelets d'étaim, chauteaux de pain.
L'épouse apporte à l'époux les éléments du
premier service à eux destinés. La coutumes permet à la femme de manger avec
son mari les soirs d'épousailles zingares.
"Les célibataires, les veufs, les isolés sont
servis par celle qui n'ont pas ou plus charge d'époux."
Le repas a alors lieu.
A la fin, "une minute de profond recueillement" réunit les
participants, et, sur un signal donné par le chef, l'hymne istarien est
entonné.
- A l'épouse, il est rappelé à
la mariée que celle-ci doit obéissance, fidélité, dévouement à son époux.
- Au mari, chef de la nouvelle
famille, "il est recommandé d'aimer, de protéger, de guider dans le dur
sentier de vie" la nouvelle mariée.
Une fois l'hymne terminé, les assistants se lèvent
et un long cri de "longue et heureuse vie aux enfants de Marius
"(chef du clan), retentit par 3 fois.
Le soleil se lève. La musique est proposée aux
convives. Les instruments se composent comme suit : violons, violoncelles,
cithares, flûtes, une harpe, un basson.
Les mariés ouvrent la danse en compagnie des témoins.
A minuit, c'est le Coucher de la mariée,
"dernière et significative phase des noces zingares".
Les proches des époux se dirigent vers la
roulotte nuptiale dont ils gagnent le balcon, afin de préparer "l'Appel
de l'épouse à l'époux".
Avant de monter l'escalier vers sa future
demeure, la mariée demande à son père "la permission de monter". Le père
refuse puisque cette roulotte a été construite pour accueillir un couple et non
une personne seule. La mariée supplie alors et s'en remet à Ishtar : c'est pour
se préparer et appeler son époux. Le père obtempère alors, s'en remettant également
à la déesse.
Parvenue en haut de l'escalier, on aide la
Zoraïya à venir à bout du symbolique ruban bleu jusqu'à ce qu'il cède et
qu'elle puisse pénétrer à l'intérieur de la roulotte.
Maïne, "suivie de sa mère" entre
enfin chez elle. Les autres rejoignent les parents proches et attendent
"l'apparition de l'épouse au balcon de sa demeure fleurie".
La mère, à son tour, abandonne la jeune mariée.
La mariée apparaît vêtue d'un "léger vêtement
d'amour", mousseline ou tulle transparente qui voile à peine les beautés
de la vierge.
"Avançant sur ses babouches, logeant ses
pieds nus et parfumés, la belle Zoraïya lentement détache l'autre ruban bleu
qui lui ceint la taille et qui crie sa vertu". Elle le roule sur son
doigt, puis le laisse tomber à ses pieds.
La jeune Koushite dit à tous qu'elle attendait
l'amour.
Le marié souhaite ensuite la bonne nuit à tout le
monde...